vendredi 27 février 2015

J'ai souri

Tout à l'heure, j'étais en train de courir dans la rue. Un petit trajet, le parking derrière la maison, mais j'ai quand même laissé mes bébés seuls dans la maison pendant deux bonnes minutes. Deux minutes de stress pour moi, c'est la première fois que je le fais. On rentre de chez mon frère, je les décharge de la voiture, je les couche l'un après l'autre, ils dorment déjà à moitié, et puis je ferme la porte, je vais garer la voiture, et je rentre vite vite à la maison. Et en courant, j'ai souri.

J'ai souri parce qu'il y a quelques semaines, après mon opération du sein, je ne pensais pas retrouver aussi vite cette mobilité, cette énergie. Parce que j'ai senti mon nouveau-faux-sein bouger pendant que je courais.
J'ai souri parce que je me suis rendu compte que je m'en sortais quand même hyper bien toute seule. Parce que quand je suis allée lever mon fils chez mon frère, il s'est cramponné à moi. Parce que je suis leur roc. Et qu'il y a quelques mois, je pensais ne plus jamais avoir ce rôle auprès d'eux. Je pensais que je serai la personne pas fiable, la personne malade dont on ne sait pas si elle va mourir ou non. Je me mettais en retrait. J'avais de la peine à imaginer leurs rentrées scolaires, les premiers pas de ma fille. Et aujourd'hui par la force des choses je me retrouve à être seule à m'occuper d'eux, et putain, je gère super bien.
Je gère bien les colères, les frustrations, le speed. J'ai un peu de mal avec leur réveil très matinal, mais une fois qu'ils sont dans mon lit et qu'on fait des câlins en regardant Tchoupi, bah ça va. Je gère suuuper bien les câlins, c'est ma partie préférée en fait.

Ça n'est pas facile, je rêve de pouvoir souffler, d'avoir un weekend rien que pour moi où toutes les emmerdes ne seraient que des mauvais rêves.
Où le cancer du poumon et du cerveau de ma mère ne seraient pas réels, et où elle serait encore là tous les jours pour pouvoir m'épauler, et pas à l’hôpital depuis un mois à galérer pour se remettre de son opération.
Où mon mari ne ferait pas une dépression et ne me mettrait pas toute la responsabilité sur le dos. Et où il serait solide, normal, souriant, drôle, comme avant, quoi. Pas instable et décidé à me faire payer cette année où j'ai dû mettre notre couple en parenthèses pour me sauver.
Où mon cancer du sein ne serait vraiment qu'un cauchemar aussitôt évanoui, et pas une réalité que je peux encore toucher du doigt. Même si je suis "guérie", j'ai encore une opération assez lourde qui m'attend : mastectomie avec reconstruction immédiate du sein droit, en prévention. Et puis après, quoi ?

Donc bon, j'étais là, en train de courir, et tout d'un coup c'est comme si tous mes soucis s'étaient envolés. Et je me suis dit, t'es ptêtre encore malade et entourée d'emmerdes, mais en attendant tu cours, tu es là, pleine de vie, prête à bondir, et les deux petits corps tout chauds qui se sont serrés contre toi quand tu es montée les coucher, ils sont remplis d'amour. Et juste pour ça, tout le reste vaut le coup.


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