dimanche 28 juin 2015

Ca serait plus simple



Des fois, je me dis, si je n’avais que lui, ça serait plus simple.
Je n’aurais qu’un petit garçon de bientôt trois ans à gérer.
Il ne serait pas jaloux de l’attention que je porte à sa petite sœur.
J’aurais tout mon temps pour faire des activités avec lui, jouer, lui expliquer.
Je ne devrais pas attendre un réveil de sieste matinale pour aller me promener avec lui.
Je ne devrais pas me lever à six heures, avec elle, pour éviter qu’elle le réveille.
Je ne devrais pas courir sans cesse, faire attention à ses mouvements et aller la chercher alors qu’elle est déjà à la moitié de l’escalier.

Mais je n’aurais pas ces petits bras frais qui se glissent autour de mon cou en disant « maman ».
Je n’aurais pas ce sourire inimitable et ce petit rire qui me font fondre.
Je n’aurais pas ces danses dès que de la musique passe, mélange de grâce et de dandinement.
Je n’aurais pas cette impression bizarre d’être une et une seule avec ma petite fille, de tant reconnaître de choses dans ces yeux.

Alors si je n’avais qu’elle… ça serait plus facile.
Elle serait enchantée d’avoir toute mon attention, tout le temps.
Je pourrais patiemment lui expliquer pourquoi elle ne peut pas escalader la table.
Je ne devrais pas jouer aux pompiers cinquante fois par jour.
Je n’aurais pas à expliquer tout le temps pourquoi le ciel est bleu, pourquoi il faut aller à la crèche, qui est ce monsieur, pourquoi on achète du pain. Ni à répéter qu’il faut y aller, qu’il faut mettre les chaussures, qu’est-ce que je viens de dire, on doit y aller.

Mais je n’aurais pas ces grands yeux bleus concentrés.
Je n’aurais pas ces petites phrases sorties de nulle part qui me font tant rire.
Je n’aurais pas « Au clair de la lune » et « petit papa Noël » chantés vingt fois par jour.
Je n’aurais pas ce petit moment du coucher où je lui raconte sa journée et où je me rends compte de tout ce qu’on a vécu.
Je n’aurais pas ce moment  de grâce le matin où il se glisse entre mes draps parce que sa sœur l’a réveillé, et qu’on est que tous les deux, dans le silence du matin, à faire un câlin.

Et puis des fois je me dis, si je ne les avais pas, ça simplifierait beaucoup les choses.
J’aurais pu partir d’ici, m’installer à Paris, à Grenoble, tout refaire, sans penser moyens de garde, rythme d’enfer, nature environnante pour eux.
J’aurais pu partir loin de leur père, qui me met la pression avec eux. L’oublier plus facilement.

Mais je n’aurais pas cette fierté d’être devenue maman, d’avoir porté la vie deux fois et d’avoir magnifiquement accouché.
Je n’aurais pas ces moments de bonheur où je les vois se faire un câlin entre eux, ces éclats de rire quand on joue dans la piscine ou quand on danse tous les trois ensemble.
Je n’aurais pas ce cœur gonflé de joie quand je vais les regarder dormir.
Je n’aurais pas eu les mêmes moyens pour combattre ma maladie.

Alors je me dis : finalement, c’est celle-là, ma vie rêvée. Avec eux.

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